Les restaurants peuvent accueillir dès ce 2 juin leurs clients. Olivier Bellin ouvre son restaurant et son hôtel le 17 juin. Le chef 2 étoiles veut que cette crise serve à aller plus loin. Développer les circuits courts, soutenir les producteurs locaux et pourquoi pas soutenir financièrement les restaurateurs qui font le choix des produits de proximité. Entretien engagé du chef breton.

Tout est prêt pour l’ouverture de vos 2 établissements l’hôtel et le restaurant ?

Olivier Bellin, chef 2 étoiles et propriétaire de l’hôtel-restaurant L’Auberge des Glazicks à Plomodiern : “Nous avons prévu un mètre de distance entre les tables, un marquage au sol, les cartes seront sur les tables et des masques et visières pour nos équipes. Nous connaissons notre métier, nous faisons bien les choses. Donc les règles sanitaires sont mises en place mais nous voulons continuer à faire vivre à nos clients le plaisir du partage, l’expérience gastronomique. C’est pour cela que les gens viennent au restaurant ! Pour l’hôtel, nous allons instaurer la prise de température à l’arrivée. Je ne peux pas me permettre financièrement de fermer 14 jours. C’est à chacun de respecter les règles.”

Comment avez-vous vécu cette période de fermeture?

Olivier Bellin : “Je n’ai pas voulu faire de la vente à emporter parce que ça ne correspond pas à ce que je sais faire. J’ai voulu réfléchir à l’après et ce que je pouvais changer. Cette crise doit faire évoluer la restauration. J’ai toujours fait du circuit-court mais aujourd’hui je veux aller plus loin. J’ai crée un jardin où je fais pousser mes propres légumes, j’ai développé un carré “vert” au restaurant, un compost.”

Cette crise doit appeler à soutenir le “local” ?

Olivier Bellin : “J’ai toujours privilégié le local, cette crise n’est pas une révélation à ce niveau mais je veux plus m’engager. Désormais, sur nos menus, les clients sauront d’où viennent les produits avec le nom et les coordonnées du producteur. C’est à nous, restaurateurs, de mettre en avant l’économie locale. Cette crise me donne encore plus envie de soutenir et d’être solidaire de tous les talents qui se trouvent à proximité.”

Certains restaurateurs n’arriveront pas à se relever de ces mois de fermeture

Olivier Bellin : “La profession est durement touchée, nous sommes obligés de faire des efforts, sinon nous sommes morts. Il faut que nous soyons plus solidaires dans la profession. Pourquoi il n’existerait pas un système de bonus-malus pour les restaurateurs qui commandent leurs marchandises en circuits courts ? Avec une baisse de la TVA par exemple. Le chef de l’Etat m’a dit que nous étions l’image de la France alors aidons à faire mieux. La qualité d’un grand chef, à l’avenir, ne sera peut-être pas par ses étoiles mais par sa capacité à faire travailler des producteurs autour de lui.”

Votre restaurant, comme votre hôtel, s’adresse à une clientèle aisée, voulez-vous démocratiser votre cuisine ?

Olivier Bellin : “Il y a 18 ans, j’avais une vingtaine de familles de Plomodiern qui venaient dans mon restaurant. Aujourd’hui, ma clientèle vient de toute la Bretagne mais les locaux ne viennent plus. J’ai décidé d’arrêter le menu le plus cher qui était à 260 euros, je me dis que ça n’a plus de sens de proposer des prix aussi élevés. C’est une réflexion qui doit avoir lieu dans la restauration de luxe. Je veux aujourd’hui donner accès à ma cuisine à ceux qui n’avaient pas les moyens de venir. J’espère ouvrir prochainement dans mon village de 2 300 habitants une table avec une cuisine de marché et accessible.”

Pour vous, il ne faut pas repartir comme “avant” cette crise ?

Olivier Bellin : “Je veux repartir en me disant qu’il faut faire un nouveau monde, plus solidaire, plus écologique. Je fais des changements à mon niveau, dans ma cuisine, dans mon approche du métier. Nos 2 samedis qui suivent l’ouverture, nous sommes complets, c’est très postitif. Toute l’équipe a à coeur de faire découvrir aux premiers clients nos nouveaux produits. Et si la clientèle suit, j’aurai réussi mon pari de maintenir l’emploi dans mon établissement et d’être en adéquation avec mes convictions.”