“Le 11 Mai, je suis au travail”. Les coiffeurs vont pouvoir à nouveau accueillir leurs clients le 11 mai. Comment gérer les gestes barrière ? Comment organiser le travail avec de nouvelles contraintes et une forte demande ? Portrait de Philippe Chevalier, coiffeur à Noyal Châtillon sur Seiche, en Ille-et-Vilaine.

“On sait que nous sommes attendus au vu du nombre de messages sur mon répondeur ou sur le messenger du compte facebook du salon !”, s’amuse Philippe Chevalier. Coiffeur depuis plus de 40 ans, il est propriétaire d’un salon à Noyal Châtillon sur Seiche depuis 20 ans et a une salariée. “Il y a même des petits mots glissés sous la porte du salon…” L’autorisation d’ouvrir pour les salons de coiffure annoncée par le Premier Ministre est un soulagement pour la profession et une libération pour leurs clients. “Nous sommes moins confrontés à la violence de la crise que les restaurateurs par exemple. Dans le département, il y a 900 salons, plus de 50% travaillent seuls, il y a moins de problématiques de personnel. Mais les structures avec peu de trésorerie vont avoir du mal à relever la tête avec 2 mois sans chiffre d’affaires et les frais pour relancer la structure”, constate Philippe qui est également président de l’UNEC 35 (Union nationale des entreprises de coiffure). Ouvrir, soit, mais dans quelles conditions pour les coiffeurs et leurs clients ? “Nous avons travaillé à une fiche sanitaire commune au niveau régional pour mettre en place nos nouvelles règles de fonctionnement”, explique le président du syndicat.

“Je vais devoir étendre mes horaires et ouvrir 6 jours sur 7”

Le salon de coiffure post-confinement ne sera plus le même qu’avant le Covid-19. Fini le petit café, la tasse de thé, le magazine à feuilleter, “nous allons devoir, avec ma collaboratrice, désinfecter entre chaque client, les petits services comme la boisson chaude ou la presse ne seront plus proposés pour des raisons sanitaires. Le temps sera plus long entre chaque client, toutes les 40 minutes contre 30 minutes auparavant”, explique Philippe Chevalier. Et le propriétaire du salon breton d’égrener le dispositif sanitaire mis en place : masques ou visière en plastique, gel hydroalcoolique, blouse ou peignoir à usage unique ou qui devra être désinfecté, distanciation. “J’ai commandé 200 masques, 2 litres de gel, des peignoirs et un défroisseur avec vapeur pour désinfecter le linge à plus de 100°C, j’en ai pour plus de 500 euros”. Au-delà de la forte demande, Philippe sait qu’il va falloir travailler plus, étendre ses horaires, ouvrir 6 jours sur 7, pour avoir assez de chiffre d’affaires. “Nous n’aurons plus d’aides une fois qu’on sera ouvert mais il faudra assurer les charges et notamment celles, nouvelles, liées aux règles sanitaires”, précise-t-il. Le coiffeur compte aussi sur la compréhension de ses clients. ” Ça va être très compliqué les premières semaines, coiffer, répondre au téléphone, désinfecter, nous ne pourrons prendre que sur rendez-vous. Il faudra que chacun fasse preuve de bon sens”.

“Trouver le matériel ? C’est le système D”

Dès le début de la crise, Philippe a voulu créer du lien entre les professionnels du département. “J’ai lancé un groupe WhatsApp, nous sommes plus de 100 coiffeurs. Nous nous soutenons, échangeons des conseils pour trouver masques et gels. C’est un peu le système D”, confie le président de l’UNEC 35. Ils ont souscrit une convention de partenariat avec certains fournisseurs par crainte de se retrouver en manque de matériel. Du haut de ses 57 ans et 40 ans de carrière dans la coiffure, Philippe espère que les clients auront confiance en ces professionnels qui font tout pour ouvrir dans les meilleures conditions le 11 Mai. “Personne n’est responsable de cette situation et c’est dur de voir le stress que cela génère chez les indépendants. J’espère qu’au moins ça incitera les gens à consommer local, à aller chez le coiffeur, le fleuriste, le boulanger de leur commune”, s’inquiète-t-il. Philippe, lui, ne cache pas sa joie de retrouver son salon et ses clients, aucun doute que cela est réciproque ! “Le 11 Mai, je suis au travail”, affirme-t-il, soulagé.