Les Vieilles Charrues reporté en 2021. C’est la décision “la plus douloureuse” qu’ait jamais prise le conseil d’administration du festival. Entretien avec Jérôme Tréhorel, directeur du festival, qui se bat pour que l’association survive et exhorte les autorités à mettre sur pied un plan de relance pour la culture.

Jérôme Téhorel, directeur du festival des vieilles charrues

“Vous parlez d’une décision douloureuse, qu’il était, pour vous, nécessaire de prendre”

Jérôme Tréhorel, directeur du festival des Vieilles Charrues : “Lundi soir, lors de l’allocution du chef de l’Etat, on s’attendait à une décision sur le maintien ou non des festivals cet été et la seule date, c’est l’annulation des festivals jusqu’à mi-juillet. Les Vieilles Charrues devaient débuter le 16 juillet ! On a pris nos responsabilités et décidé le report sans arrêté d’interdiction. Notre priorité c’est la santé, la sécurité des quelques 300 000 festivaliers attendus, des équipes. On se devait d’être transparents.”

“Pourquoi faire le choix d’un report et pas d’une annulation ?”

-Jérôme Tréhorel : “Le report permet aux festivaliers qui le souhaitent de garder leurs tickets. Nous allons proposer le remboursement pour ceux qui le veulent. Les billets pour l’édition 2020 sont partis très vite, il n’y avait jamais eu un tel engouement. Cela permet à ceux qui ont eu du mal à avoir leur billet de les garder.”

“Les semaines à venir vont être capitales pour la survie de l’association qui gère le festival des Vieilles Charrues ?”

-Jérôme Tréhorel : “C’est le temps des discussions avec les producteurs, les fournisseurs. Nous avons besoin que les autorités prennent l’arrêté d’interdiction. Cela nous place, en tant qu’organisateurs de festival, dans un cas de force majeure qui annule tous les contrats, notamment auprès des artistes, ce qui équivaut à plusieurs millions d’euros. Par contre, nous allons devoir faire face aux frais de fonctionnement estimés à 1,5 millions d’euros qui vont rester à notre charge.”

“Vous parlez de discussions, je suppose que cela implique celles avec les artistes”

-Jérôme Tréhorel : “Nous aimerions pouvoir offrir la même programmation les 15, 16, 17, 18 juillet 2021 que celle qui était prévue en 2020. C’est en cours de discussion. Beaucoup d’artistes ne pourront probablement pas reprendre des tournées avant 2021, pourquoi pas revenir à Carhaix ! Nous sommes évidemment en contact avec les producteurs de Céline Dion. C’est une star planétaire, ses projets sont prévus plusieurs années à l’avance, rien n’est fermé. Si elle ne peut pas revenir, nous rembourserons les billets. Il faut comprendre que c’est le monde du spectacle tout entier qui est touché, les producteurs aussi. Il faut maintenant travailler ensemble et rebondir.”

“Comment le monde du spectacle, de la culture, va pouvoir se relever de cette crise ?”

-Jérôme Tréhorel : “Le gouvernement a mis en place des aides immédiates, chômage partiel, exonération de charges mais il faut aller plus loin et plus vite. Il faut soutenir les intermittents, sans eux, pas de festival l’année prochaine. On ne va pas pouvoir travailler de la même manière. Les cachets des artistes sont passés en quelques années de 1,5 millions d’euros à 4-5 millions, on ne pourra pas payer ça l’année prochaine. Nous attendons des annonces du gouvernement dans les 15 prochains jours.”

“Vous demandez un plan de soutien au gouvernement ?”

-Jérôme Tréhorel: “Oui, il faut un plan de relance de la culture ! J’ai eu une douche froide lundi soir par une “non décision” du Président de la République sur les festivals après la mi-juillet, j’en veux pas une deuxième ! Au-delà des emplois à préserver dans ce secteur, il va falloir revoir les taxes liées au secteur culturel. Et aider les mécènes. Le festival des Vieilles Charrues est possible en grande partie grâce au mécénat, mais les entreprises bretonnes qui nous soutiennent seront probablement dans une situation économique difficile qui les empêchera de nous aider. Pourquoi ne pas aller au-delà des 60% d’exonération pour le mécénat pour le secteur culturel et sportif ? Nous sommes à la disposition du gouvernement pour travailler avec eux sur ce plan de relance. Sans ça, la culture, en France, risque de s’effondrer.”